Le Shiatsu chez le nourrisson : être là quand c’est difficile

Lors de traitements Shiatsu pour bébés et jeunes enfants, je tiens compte du fait que leur système de méridiens est encore en formation, j’adapte le traitement par des gestes spécifiques au Shiatsu pour bébés et je le complète par des techniques issues du massage Newar pour bébés ou du Shonishin. Dans le Shonishin, les points d’acupuncture, les méridiens et les familles de méridiens sont traités de manière très douce à l’aide d’un petit instrument. En règle générale, les traitements sont plutôt courts pour répondre au mieux aux besoins des bébés.
Il est également possible de montrer aux parents comment traiter eux-mêmes leur enfant par des points de pression ou de simples massages, par exemple en cas de coliques. La situation à la maison se détend souvent considérablement grâce à cette instruction des parents.
L’entretien avec les parents et leur observation fournissent souvent à la thérapeute des informations importantes sur les causes possibles des troubles ou sur les raisons qui font que la situation est vécue comme difficile. Le travail se fait avec les parents ou la mère en compagnie de son bébé. Au-delà du dialogue et de l’écoute, l’accent est mis sur le développement d’un lien familial solide. Accompagner toutes les personnes impliquées dans ce processus est un travail qui demande une grande sensibilité et de l’empathie.

Difficultés d’adaptation du bébé et de la mère : un exemple
Je me souviens d’une mère qui, après un accouchement difficile, ne se sentait physiquement pas bien, ne réussissait pas à établir un lien avec son nouveau-né et était très épuisée. Lors du premier traitement, elle avait posé le bébé sur le futon, loin d’elle. C’était comme si l’enfant n’était pas présent pour la mère. Le traitement de la région abdominale de la mère au niveau des zones de la Rate et du Cœur, et en particulier le traitement du méridien de la Rate au niveau des parties inférieures des jambes, constituaient l’essentiel de la thérapie. Les objectifs étaient de soutenir, chez la cliente, la connexion à son propre centre, l’ouverture du cœur à son enfant et de faciliter le processus vers son nouveau rôle de mère. Lors de la prochaine séance, je lui ai demandé si je pouvais rapprocher sa fille de son corps, et lors de la séance suivante, je lui ai posé son bébé sur la poitrine et j’ai continué à traiter les méridiens du Cœur et de la Rate. L’important était d’établir un lien entre l’enfant et la mère, je restais donc toujours en contact avec l’enfant avec ma deuxième main pendant le traitement de la mère. Grâce à ce contact extérieur, en particulier lors du traitement du méridien de la Rate de la mère, elles ont toutes deux pu se détendre et ressentir une grande satisfaction. Au cours des traitements suivants, j’ai observé que le contact entre la mère et l’enfant se faisait beaucoup plus naturellement et de manière tout à fait spontanée. Au terme de la thérapie, la mère a dit que c’était seulement maintenant qu’elle pouvait dire qu’elle aimait son enfant et qu’un lien s’était créé entre eux.

Nourrir la mère et l’enfant
Un autre exemple était celui d’une mère qui avait du mal à nourrir son enfant – elle n’avait pas assez de lait et le bébé pleurait souvent. Elle ne supportait par ailleurs que peu de proximité physique avec son enfant. Elle paraissait nerveuse, parfois débordée, impatiente et physiquement faible. Comme elle devait porter son enfant pendant plusieurs heures par jour pour le calmer, elle n’avait plus la patience de répondre à ses besoins en fin de journée.
Le traitement s’est ensuite concentré chez la mère sur les méridiens de la Terre, à savoir Rate et Estomac, dans un but de recentrage, de renforcer son sentiment maternel, de lui permettre de ressentir son corps et de l’encourager à se nourrir et à s’accepter, mais aussi à développer de l’amour pour elle et pour son enfant.
Chez l’enfant, le traitement de la famille de méridiens antérieurs (Poumons, Gros intestin, Estomac, Rate) était important. La thérapie visait ici à aider le bébé à trouver son propre centre et à développer la confiance dans la vie et en sa mère en tant que personne de référence.
Le dialogue avec la mère était très important. Elle avait perdu beaucoup d’énergie à cause de la forte faim de son enfant et arrivait à bout de force. Lors des entretiens, la femme a révélé qu’elle avait souffert de troubles alimentaires par le passé et elle expliquait que la sensation physique après l’allaitement ressemblait aux crises de faiblesse qu’elle avait connues aux pires moments de son anorexie.
Quand une personne souffre de troubles alimentaires, je cherche à collaborer avec une nutritionniste vers laquelle j’ai orienté cette cliente. Grâce à un programme alimentaire bien défini et régulier, la femme a retrouvé sa force physique et l’enfant a pu être nourri de manière optimale. Tous deux ont ainsi pu se détendre et les pleurs de l’enfant ont cessé. Le lien entre la mère et l’enfant a pu se développer de manière saine et harmonieuse. Tout cela n’a été possible que lorsque la mère avait réussi à se détendre et à être nourrie elle-même.

Accouchement difficile
Les incidents inattendus pendant le processus d’accouchement sont aussi un thème fréquent de consultation en Shiatsu. Je me souviens d’un cas très touchant. Les parents m’ont consultée par l’intermédiaire d’une sage-femme que je connaissais. Le père était médecin assistant. L’accouchement avait été particulièrement traumatisant. Le jour de la naissance, le premier contact entre la mère et le bébé n’avait pas été possible comme souhaité en raison des circonstances. Le père, en dépit de sa profession, se sentait impuissant face à la situation.
La séance de Shiatsu a eu lieu à quatre : le père était assis en tailleur au bout du matelas, la tête de la mère reposant sur ses jambes, et le nouveau-né était couché sur la poitrine de la mère. Lors de ce traitement aussi, le contact entre le méridien de la Rate de la mère et le nouveau-né était essentiel. Ensemble, les parents se sont souvenus du moment où leur enfant était né, en imaginant ce qu’aurait pu être ce premier contact physique étroit, cette expérience commune avec le nouveau-né. C’étaient ces sentiments, issus de l’imagination de la naissance souhaitée, qui nous ont guidés dans le traitement de Shiatsu. Ainsi, ce qui n’avait pas pu se produire dans la salle d’accouchement pouvait émerger plus tard dans le Shiatsu. Le sentiment initial d’impuissance a pu faire place à de belles émotions, des moments touchants de joie, des larmes de bonheur et de gratitude.